Los Angeles 2028 : le CIO franchit le pas du naming des sites olympiques
L’histoire retiendra des Jeux de LA28 comme une rupture symbolique : ceux où, pour la première fois, des noms commerciaux ont franchi les portes sacrées de l’Olympisme. Une chose est certaine : avec l’intégration du naming, les Jeux entrent dans une nouvelle ère - celle d’un modèle économique résolument tourné vers la réalité du sport-spectacle global.

C’est un petite révolution dans l’écosystème olympique : pour la première fois de son histoire, le Comité international olympique (CIO) accepte que des enceintes conservent leurs appellations commerciales pendant les Jeux. Cette décision, annoncée à trois ans des Jeux de Los Angeles en 2028, marque une rupture avec plus d’un siècle de tradition visant à protéger les lieux de compétition de toute influence directe des marques.
Jusqu’ici, la règle était stricte : les stades, arénas et autres sites sponsorisés ne pouvaient garder leur nom d’usage. La pratique consistait à les rebaptiser temporairement « Arena 1 », « Stade Olympique » ou encore « Centre aquatique » - le temps de la quinzaine. Seule la signalétique des partenaires TOP, le programme mondial du CIO regroupant des marques comme Visa, Omega ou Coca-Cola, avait une place visible. Mais l’appellation des enceintes restait taboue.
Avec Los Angeles 2028, tout change. Selon le Los Angeles Times, le CIO a donné son feu vert au comité d’organisation californien (LA28) pour intégrer officiellement des droits de naming. En d’autres termes, les sponsors ayant investi ces dernières années dans les infrastructures sportives pourront afficher leur nom pendant la compétition.
Une décision dans l’air du temps américain
Cette bascule s’inscrit dans un contexte particulier. Aux États-Unis, le naming des enceintes constitue une pratique ancrée depuis des décennies. Du baseball à la NBA en passant par la NFL, la quasi-totalité des salles et stades portent le nom d’un partenaire majeur, qu’il s’agisse d’une banque, d’une marque de télécommunications ou encore d’une entreprise automobile. Dans un pays où le sport est étroitement lié au divertissement et au business, il semblait presque inévitable qu’une édition olympique locale pousse le CIO à assouplir sa position.
Les premiers exemples confirment cette orientation : le Comcast Squash Center, situé à Universal Studios, et le Honda Center d’Anaheim conserveront leur nom pendant les Jeux. Pour le constructeur automobile japonais, déjà partenaire officiel de LA28 depuis plusieurs mois, cet accord garantit à son enceinte de volley-ball une visibilité mondiale inédite. De son côté, Comcast se place dans le sillage d’un événement qui attirera plusieurs milliards de téléspectateurs.

Un relais financier majeur pour LA28
Si le CIO a cédé, c’est parce que l’enjeu économique est considérable. Avec un budget prévisionnel de 7,1 milliards de dollars, les organisateurs de LA28 doivent trouver des ressources nouvelles afin de limiter le recours aux financements publics et de respecter la promesse de Jeux autofinancés.
Le président de LA28, Casey Wasserman, évoque déjà des résultats très encourageants : près de 70 % de l’objectif de sponsoring national - fixé à 2,5 milliards de dollars - serait atteint. L’ajout de droits de naming constitue donc une manne supplémentaire pour épauler ce modèle, qui repose essentiellement sur les partenariats privés.
Pour les marques, le bénéfice est double : elles s’associent à la puissance symbolique et émotionnelle des Jeux tout en s’assurant un retour sur visibilité à l’échelle mondiale.
Des conditions strictes et restrictives
Cette nouveauté n’est toutefois pas accessible à toutes les entreprises. Les enceintes portant déjà un nom sponsorisé - comme la Crypto.com Arena, le BMO Stadium ou l’Intuit Dome - devront passer par la case partenariat officiel pour conserver leur appellation olympique. En clair, seuls les acteurs acceptant de rejoindre la famille des sponsors majeurs auront le droit de voir leur marque associée aux sites de compétition. Sans ce ticket d’entrée, les enceintes seront rebaptisées provisoirement, conformément à l’ancienne règle.
Cette nuance illustre la stratégie du CIO : ouvrir à de nouvelles sources de revenus, mais en gardant un contrôle ferme sur les partenaires autorisés. Le système empêche toute « pollution » commerciale anarchique et garantit que la valeur de l’association olympique reste élevée, voire exclusive.
Une nouvelle ère pour le marketing des Jeux
En validant le naming, le CIO s’aligne clairement sur le modèle nord-américain du sport-business, où l’expérience spectateur ne se limite pas au terrain, mais englobe un univers de marques omniprésentes. Certains puristes s’inquiètent déjà : la neutralité olympique, pilier historique, risque-t-elle d’être diluée ? Le risque existe.
Pourtant, cette ouverture peut aussi être interprétée comme une évolution inévitable. Face à la concurrence des grands événements sportifs privés, les Jeux doivent s’adapter, moderniser leur approche commerciale et attirer des sponsors en quête de partenariats plus visibles et plus concrets que de simples panneaux publicitaires.
En choisissant Los Angeles comme terrain d’expérimentation, le CIO sait qu’il bénéficie d’un contexte favorable. Ville-monde, capitale de l’industrie du divertissement et bastion d’un marketing sportif assumé, Los Angeles est sans doute l’endroit le plus propice pour tester ce virage historique. Si l’expérience est concluante, difficile d’imaginer que le CIO revienne en arrière.