Territoires

Julien Pavillard : «  La Fête des Lumières reste le premier événement lumière dans le monde ».

Par Pascale Baziller | Le | Acteurs publics

La Fête des Lumières 2023, en cours de certification 20121, marque son engagement fort en matière de développement durable et d’inclusivité avec toujours des projets lumineux de créativité. Julien Pavillard, directeur des événements et coordinateur général de la Fête des Lumières à la Ville de Lyon nous présente cet événement ancré dans le territoire.

« Sign » de Paul Vendel et Sandra de Wolf, un brasier sur l’eau place de la République - © Maikid
« Sign » de Paul Vendel et Sandra de Wolf, un brasier sur l’eau place de la République - © Maikid

Dans quelques jours (du 7 au 10 décembre 2023), Lyon célébrera La Fête des Lumières. Que représente cet événement pour la ville et son territoire ?

La Fête des Lumières représente la fête la plus importante de l’année pour les Lyonnais. Elle s’appuie sur une fête religieuse, celle de l’Immaculée Conception dite fête du 8 décembre et symbolise également la tradition des fameux « lumignons » (verres garnis d’une bougie) ou lampions allumés et déposés sur les bords des fenêtres de chaque famille. Dans les années 60, la tradition des lumières se décline avec un concours d’illuminations de vitrines qui marque le début des festivités de la fin d’année et les célébrations du 8 décembre. Puis, elle prend un tournant en 1999 avec la participation d’artistes qui exposent leurs installations dans la ville. Mais, elle connaît une grande évolution entre 2005 et 2009 pour devenir une grande fête. C’est depuis un événement ancré dans la culture auquel s’identifient les Lyonnais et les grands Lyonnais. Notre savoir-faire français local en matière d’artistes et d’organisation d’événement est reconnu. La Fête des Lumières reste le premier événement lumière dans le monde.

Une Fête des Lumières qui a évolué ces dernières années ?

En effet, nous avons donné avec Grégory Doucet (maire de Lyon) et Audrey Hennocque (adjointe au maire de Lyon en charge des finances, des commandes publiques et des grands événements) une double impulsion à la Fête des Lumières. La plus évidente est l’impulsion écologique avec une volonté et une réflexion, au-delà de l’utilisation de leds pour les installations qui est devenue aujourd’hui quasiment une norme en lumière et en vidéo, sur l’alimentation durable, la gestion des déchets pour tendre vers le 0 déchet et une empreinte carbone que nous essayons de minimiser le plus possible. Par ailleurs, nous avons mis en œuvre cette année une démarche de certification de la norme ISO 20121 pour la Fête des Lumières. Cette certification sera effective en 2024 et servira à l’ensemble de la direction des événements. Notre démarche correspond à la politique écologique et RSE de la ville de Lyon. Elle comprend un engagement environnemental fort mais également sociétal en termes d’accessibilité et d’inclusion au service du public. C’est un premier volet de l’évolution de la fête, qui n’est pas forcément visible pour les gens. Le second volet a été de rendre la fête plus culturelle. La mairie de Lyon m’a témoigné sa confiance en me donnant carte blanche.

Evanescent de l’Atelier Sisu, une expérience immersive autour de bulles  - © DR / Fête des Lumières
Evanescent de l’Atelier Sisu, une expérience immersive autour de bulles - © DR / Fête des Lumières

Qu’entendez-vous par fête culturelle ?

L’idée est de faire dans l’espace public une exposition de l’état de la lumière et de la vidéo dans le monde et ainsi faire découvrir des artistes français et venus de l’étranger. C’est aussi montrer que la lumière est un art, qu’elle est culturelle. Nous n’avons pas la même approche de la lumière d’une culture à l’autre, d’un pays à l’autre. Elle change suivant nos modes de vie et selon l’endroit où l’on vit. En Asie par exemple, la lumière de référence est souvent celle de la lune, une lumière froide alors qu’en France nous sommes liés au soleil, une lumière plutôt chaude. Cette caractéristique culturelle se concrétise dans le choix des projets et aussi dans notre discours en apportant du sens à la fête. Par exemple, l’an dernier, place des Terreaux, des portraits du musée des Beaux-Arts de Lyon étaient diffusés sur les façades du palais. Ces portraits s’animaient, chantaient et invitaient le public à les accompagner grâce au rythme de la playlist du Grand Mix des Inook. À travers cette installation ludique et joyeuse qui repose sur la technique du deepfake (qui permet de manipuler une vidéo ou photo), notre propos était aussi d’informer sur les possibilités offertes par ce procédé. Cette année, la place des Terreaux accueille Cellullo/D (à prononcer « Celluloïd ») de Bruno Ribeiro. Ce projet nous offre la métamorphose, en direct, de films légendaires réalisés par les frères Lumière, en utilisant des programmes d’intelligence artificielle (IA). Ce paysage cinématographique spectaculaire accompagné par la musique de l’artiste Rone va nous interroger sur les enjeux de l’IA en matière de création. Au-delà de la projection d’images, cette installation peut ainsi développer un nouvel imaginaire, de nouvelles façons de penser ou de nouvelles opportunités d’écriture ou de réalisation…

Cellulo/d, un projet autour des œuvres cinématographiques des frères Lumière qui interroge sur l’IA dans la création - © Bruno Ribeiro
Cellulo/d, un projet autour des œuvres cinématographiques des frères Lumière qui interroge sur l’IA dans la création - © Bruno Ribeiro

    

Combien d’installations pourrons-nous découvrir pour cette édition 2023 ?

32 œuvres sur un périmètre assez large, comprenant le centre de la ville, la place des Couturiers à la Duchère, la Halle du 8 mai 1945 et la Manufacture des Tabacs mais aussi le parc de la Tête d’Or qui permet à ceux qui le souhaitent de pouvoir flâner dans un lieu plus tranquille pour une expérience onirique. Les visiteurs pourront ainsi parcourir les rues de la ville pour découvrir des installations lumineuses qui mettent en valeur de la patrimoine architectural et paysager lyonnais. Notre objectif est d’offrir un programme varié accessible à tous les publics.

Quel est le modèle économique de cet événement ?

Le budget repose sur la participation de la ville à hauteur de 2,3 millions d’euros, un montant qui est stable, à laquelle s’ajoute 1,2 million d’euros venant des partenariats. Nous avons 35 partenaires cette année qui apportent leur soutien à la fête avec un apport numéraire. Certains financent en plus ou seulement une œuvre en particulier, d’autres participent également au paiement de prestations comme les billets d’avion pour des artistes. Les dotations démarrent à 5 000 euros jusqu’à 100 000 euros. Nous avons des partenaires fidèles comme EDF, Sonepar la métropole de Lyon mais aussi de nombreuses entreprises du territoire qui se renouvellent pour partie chaque année.

Mesurez-vous les retombées économiques ?

Nous n’avons pas fait d'étude récente. Mais, nous estimons un retour sur investissement multiplié par 3 comme généralement sur un événement culturel, 1 euro investi rapporte au moins 3 euros. Nous savons que les hôtels et les restaurants sont pleins durant tout le week-end. Nous attendons 2 millions de visiteurs dont 70 % sont des régionaux (Lyon et sa région), 20 % viennent du territoire et 10 % des étrangers en majorité en provenance des pays frontaliers notamment la Suisse, l’Italie et l’Espagne. Nous avons également des touristes qui viennent de pays plus lointains. Nous allons recevoir par exemple les délégations de Chine et des États-Unis cette année.

Une initiative dont nous pourrions nous faire l’écho sachant que tous les projets méritent d’être mis en lumière ?

En effet, il est difficile de mettre en lumière un projet plus qu’un autre. Mais, il est intéressant de présenter une initiative lancée il y a deux ans. Nous invitons des artistes en situation de handicap à travailler autour d’une œuvre inclusive. L’année dernière, un très beau projet artistique Soi-même a été réalisé par de jeunes autistes du Sessad Les Passementiers, à la Fondation Bullukian.

Réalisé par la compagnie On Off avec Pierre Amoudruz, Video Visual Vernacular immerge dans le monde de la culture des sourds-malentendants - © Pierre Amoudruz
Réalisé par la compagnie On Off avec Pierre Amoudruz, Video Visual Vernacular immerge dans le monde de la culture des sourds-malentendants - © Pierre Amoudruz

Pour l’édition 2023, Anthony Guyon de la compagnie lyonnaise On Off, qui crée et diffuse des spectacles en langue des signes, accompagné du vidéaste Pierre Amoudruz a travaillé avec des sourds et des malentendants. Cela a abouti à Video Visual Vernacular (VVV), une projection qui sera déployée sur les façades de la Fondation Bullukian. C’est une immersion qui casse les barrières entre les sourds de différents pays, entre les entendants et malentendants et permet de décloisonner notre perception sur le handicap.

La Nuit de l'Événementiel Lyon

Julien Pavillard, directeur des événements et coordinateur général de la Fête des Lumières à la Ville de Lyon est membre du Jury de la première Nuit de l'Événementiel à Lyon organisée par Républik Group en partenariat avec SBE. L'événement se déroulera le lundi 11 décembre prochain au Village Matmut Stadium. Près de 60 acteurs du territoire ont candidaté lors du Grand Oral qui a eu lieu le 23 novembre dernier devant un jury de 20 décideurs du territoire.

Participez à la remise des Trophées dans 6 catégories lors de cette soirée qui célébrera les projets les plus inspirants et les plus belles innovations. Pour vous inscrire : 

https://www.republikgroup-event.fr/nuit-evenementiel-lyon