Stratégies

Live Magazine du sport : quand des enquêtes du réel se racontent sur scène

Par Pascale Baziller | Le | Agences & organisations

À quelques mois des JO Paris 2024, la Grande Halle de la Villette a accueilli le Live Magazine du sport, déclinaison du Live Magazine, un journal vivant. Entre défis, performances, colères, rires et espoirs. Un spectacle unique qui offre une autre lecture de récits réels. Coup de projecteur sur cette édition.

Journalistes, réalisateur et sportifs ont raconté successivement sur la scène une histoire chacun - © PB
Journalistes, réalisateur et sportifs ont raconté successivement sur la scène une histoire chacun - © PB

C’est un spectacle inédit qui s’est joué lundi 18 décembre à La Grande Halle de la Villette à Paris devant une salle comble : le Live Magazine du sport. Un nom écrit en lettres de néon sur la façade du bâtiment historique.  

Un spectacle du réel

Ce projet est une déclinaison du Live Magazine, un concept né aux États-Unis adapté et lancé en France par la journaliste Florence Martin-Kessler il y a près de dix ans. De quoi s’agit-il ? C’est un magazine au format original. Pas de tirage papier. Pas d’enregistrement audiovisuel pour la télévision, une plateforme web ou les réseaux sociaux. Mais un journal qui se définit comme un « spectacle du réel » où des journalistes, des photographes, des auteurs de bande-dessinée, des réalisateurs montent sur une scène successivement pour raconter chacun une histoire. Une histoire qui est le fruit d’une enquête mais se veut accessible et jouer sur les codes du vivant. Ils ne lisent pas un texte. Ils disent leur texte. Avec leurs mots. Ceux qui évoquent la substantifique moëlle d’un récit, d’une enquête. Des sons et des images, photos et vidéos, viennent accompagner et illustrer le contenu de leur récit. Un format court et rythmé : moins d’une dizaine de minutes pour chaque personne. L’idée est de proposer une nouvelle forme de narration pour attirer un public plus large à se rendre au théâtre avec un contenu de qualité et distrayant. Sur la scène de la Grand Halle de la Villette, Live Magazine avait pour fil rouge le sport. Un hors-série qui a mis en lumière la parole de journalistes et sportifs.

Live Magazine du Sport, 1h30 de spectacle autour de récits réels - © D.R.
Live Magazine du Sport, 1h30 de spectacle autour de récits réels - © D.R.

  

Des récits autour du sport

Peu avant 20 heures 30, les lumières se sont éteintes. Pas de lever de rideau comme au théâtre. Mais une scène où sont installés d’un côté trois musiciens et de l’autre deux rangées de chaises où ont pris place les « acteurs » de la soirée. Une introduction en musique qui s’ensuit par quelques mots de présentation prononcés par l'équipe de Live Magazine : « Un Live Magazine, 100 % sport, on en rêvait (…), comme remporter une médaille d’or du bon spectacle », qui fait écho aux Jeux olympiques et paralympiques 2024 qui se joueront dans quelques mois. L’événement a en effet bénéficié du soutien de Paris 2024 dans le cadre de l’Olympiade culturelle. C’est d’ailleurs dans cette même Grande Halle de la Villette abritant le Club France que seront célébrés les athlètes français pendant toute la durée des JO.

Au sommaire du Live Magazine Sport : 7 sujets. Des histoires d’hommes et de femmes autour du sport. Entre défis, performances, colères, rires et espoirs. Pour apprendre, comprendre, s’émerveiller et s’émouvoir. En direct. Sans filets.

Première enquête, celle de Mathieu Palain, écrivain et journaliste. Il conte sa rencontre et son face-à-face pendant deux ans au parloir de la prison de Fresnes avec Toumany Coulibaly. L’homme est un athlète hors-norme mais aussi un cambrioleur en série. Quelques heures après avoir remporté un titre de champion de France du 400 mètres (2015), il attaque une boutique de téléphonie. De leurs échanges, Mathieu Palain a écrit un livre « N’arrête pas de courir ». Ce qu’il fait. L’athlète qui se dit « insaisissable » s’entraîne aujourd’hui pour les prochains JO, il n’a pas rechuté.

C’est ensuite une histoire du cyclisme miné par le dopage sur laquelle revient Antoine Vayer, ancien coureur cycliste amateur, ancien entraîneur de l’équipe Festina et chroniqueur. Il a développé avec l’ingénieur Frédéric Portoleau une méthode du calcul indirect de la puissance développée (en watts) des coureurs, un moyen pour surveiller les performances. Il expose comment il a éprouvé sa méthode au fil des années pour lutter contre le dopage. Le sujet reste d’actualité avec « des coureurs de plus en plus légers et puissants », nous dit-il. Il conclut par quelques mots sur le cycliste Thibaut Pinot, perçu comme un « homme normal » qui est acclamé par le public tant pour ses échecs que ses succès.

Rien ne prédestinait Bouchra Baibanou à être la première Marocaine à avoir gravi l’Everest en 2017 et les sept plus hauts sommets du monde. Elle raconte qu’elle est née au bord de la mer, n’est pas une fille de la montagne mais a pris le virus de la montagne. Elle se rappelle en images son ascension de l’Everest, le manque d’oxygène, la mort qui rôde sur le chemin et la beauté du soleil qui se lève à plus de 8000 mètres d’altitude. Ce qui la guide, « la curiosité de voir ce qu’il y a derrière chaque montagne », conclut-elle.

C’est sur le terrain de tennis que se poursuit la soirée. Corinne Boulloud, journaliste sportive chez France Télévisions, commente en direct un échange du match Djokovic-Ruud à Roland-Garros. Elle interpelle les spectateurs sur les cris des joueurs quand ils frappent la balle. En images. Puis Blind test. Rafael Nadal reconnu par la salle. En final, elle invite le public à se lâcher en criant un grand « oui ». De la voix dans la salle. Comme un instant de soulagement avant de plonger dans un sujet grave et d’actualité. Simon Marks journaliste expose le récit de son enquête, réalisé à 6 heures de route de Nairobi, sur les féminicides qui touchent les coureuses de fond. Il révèle combien la parole de l’entourage des victimes est empêchée par peur des représailles. Dans son exposé, il parle du meurtre d’Agnes Tirop, double médaillée mondiale du 10 000 m et 4e des JO de Tokyo sur 5000 m, par son mari. À la suite de ce drame, la fondation Tirop’s Angel a été créée pour venir en aide aux coureuses victimes de violence.

Le saviez-vous ? Des Jeux olympiques féminins ont été organisés à Paris, le 20 août 1922, par la Française Anne Milliat, contre l’avis de Pierre de Coubertin. Une pionnière qui a permis aux femmes de pénétrer le monde masculin des compétitions sportives. La journaliste Anne-Cécile Genre en fait le récit, illustré par des images d’archives. Le chemin a été long. Mais, les Jeux de l’été 2024 marquent un tournant. Ils réuniront autant d’athlètes femmes que d’athlètes hommes. Une première dans l’histoire de la compétition.

La suite, une parenthèse ludique avec le cinéaste d’animation 3D NicolasDevaux qui présente quelques extraits de ses films surréalistes qui mettent en scène des animaux. Une réalisation d’orfèvre. En écho aux JO, des escargots qui font du hip-hop, des éléphants qui pratiquent des sports nautiques sous le regard d’une girafe… Des rires dans la salle.

Dernier acte, Sofia Nabet, championne poids légers de boxe anglaise. Elle décortique son geste. Celui qui fait la différence pour décrocher un titre de championne de France. Un titre qu’elle a à nouveau obtenu en 2022. Elle le dédie à son père, ancien boxeur et entraîneur qui lui a transmis la passion de la boxe. Elle est ensuite rejointe Adji Sangaré, boxeur professionnel, dans le top 10 français des poids moyens. Ils boxent ensemble sous les éclairages de la Grande Halle de la Villette. Quelques minutes. Les musiciens et le public les encouragent. Il y a comme un avant-goût de l’enthousiasme qui s’exprimera lors des Jeux olympiques et paralympiques 2024.  

Prochains Live Magazine

Plusieurs Live Magazine sont déjà programmés en France et à l'étranger en 2024.

• Live Magazine de la Transition Écologique au Carré des Docks à Nantes (5 avril 2024)

• Live Magazine du Cinéma et de l’Imaginaire à la Ferme du Buisson - Scène nationale de Marne-la-Vallée (24 avril 2024)