François Bitouzet : « VivaTech, c’est une page blanche, à chacun d’y écrire son histoire »
À l’approche de VivaTech 2025, François Bitouzet, son directeur général, partage son enthousiasme et sa vision d’un événement devenu laboratoire de l’innovation mondiale. Entre IA, entertainment et engagement RSE, il nous emmène dans les coulisses d’une édition qui promet de faire vibrer Paris et la planète tech.

Globe-trotteur infatigable, François Bitouzet sillonne la planète à la recherche des pépites de la tech. Un simple coup d’œil à son profil LinkedIn suffit à mesurer l’ampleur de ses explorations, menées en amont de la 9e édition de VivaTech. À l’approche de cet événement incontournable, qui réunira le meilleur de l’innovation mondiale du 11 au 14 juin à Paris Expo Porte de Versailles, le directeur général et ses équipes sont déjà sur le pont, prêts à donner le coup d’envoi d’une nouvelle édition prometteuse.
Dans quel état d’esprit êtes-vous à deux semaines du grand jour ?
F.B. : C’est une phase à la fois stressante et terriblement excitante ! Nous entrons dans le moment du lâcher-prise, celui où l’événement prend vie, où tout ce que nous avons préparé pendant des mois se concrétise enfin. On a qu’une envie : ouvrir les portes et voir VivaTech vibrer.
VivaTech se veut un média vivant, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
F.B. : C’est l’une de nos grandes forces : être une plateforme ouverte à tous - partenaires, visiteurs, exposants, médias… Nous sommes un outil à leur service. Je dis souvent à mes interlocuteurs : « Utilisez-nous, poussez-nous dans nos retranchements ! » C’est ainsi que l’événement se renouvelle et se dépasse chaque année. VivaTech, c’est une page blanche : à chacun d’y écrire son histoire.

Pouvez-vous nous donner un exemple concret de cette agilité pour l’édition 2025 ?
F.B. : Cette année, nous avons un superbe exemple avec la venue de Jensen Huang, le patron de Nvidia. Il ne vient pas seulement faire une keynote : il débarque avec le GTC, l’événement iconique de Nvidia, qui s’installe à VivaTech pour deux jours. Tout s’est décidé à la dernière minute, ils vont occuper un étage entier du Hall 7, nos billetteries sont mutualisées… C’est ça, l’open innovation à la sauce VivaTech : accueillir les opportunités, être un porte-avions sur lequel les innovations du monde entier peuvent atterrir.
L’innovation ne se limite pas à la tech, vous donnez cette année une belle place à l’entertainement.
F.B. : Absolument. Cette année, Live Nation nous rejoint pour lancer un challenge start-ups en partenariat avec MIDEM, pour imaginer le futur de l’industrie musicale. Le 12 juin au soir, on organise par ailleurs un afterwork exceptionnel au Dôme de Paris : 2 heures de concert avec le groupe The Blaze, dans un show immersif en son spatialisé.
Quels « side events » marqueront l’édition 2025 ?
F.B. : Il y en a pour tous les goûts : dîners exclusifs pour les Chief Marketing Officers ou les Chief Digital Officers à la Samaritaine, afterwork géant sur une péniche avec l’Alliance Française des Industries du Numérque (AFNUM), et une soirée spéciale « AI Creative Show » dédiée à l’impact de l’IA sur les industries culturelles. On y croisera des débats, des performances artistiques et, en exclusivité européenne, la présentation des films du Runway AI Film Festival. L’idée est de décrypter l’influence de l’IA dans l’entertainment tout en la vivant en direct.
L’innovation, ce n’est pas seulement des algorithmes, c’est aussi des valeurs et une vision partagée.
Comment jugez-vous l’évolution de VivatTech et la place qu’occupe l’événement sur la place internationale ?
F.B. : Depuis le premier jour, VivaTech a une vocation universaliste. Pour que la tech avance, il faut rassembler tout le monde : grands leaders, groupes corporate, start-ups, institutions publiques, grand public… Nous sommes européens, mais ouverts au monde entier. L’innovation, ce n’est pas seulement des algorithmes, c’est aussi des valeurs et une vision partagée.
Une récente étude Hotwire Global révèle la fracture profonde autour de l’impact des technologies de rupture entre le ressenti des décideurs économiques et celui du grand public. Comment l’expliquez-vous ?
F.B. : Ce décalage ne me surprend pas car on le ressent au quotidien Il s’est même accentué depuis le Covid. Ce que je constate, c’est que les entreprises sont très enthousiastes car elles ont un accès aux enjeux et voient directement les bénéfices, elles peuvent donc agir. Le grand public, lui, s’interroge davantage, notamment face à l’IA et aux peurs qu’elle suscite. Mais c’est sain ! Aujourd’hui, on prend le temps de questionner collectivement la place de la tech dans nos vies, et c’est essentiel pour la démocratie.

Comment gérez-vous la bascule entre les publics Btob et BtoC durant VivaTech ?
F.B. : Notre défi est de faire évoluer l’événement BtoB en une expérience grand public captivante, qui se déploie naturellement entre la clôture de la journée du vendredi 13 et l’ouverture des portes samedi 14. Pour y parvenir, on mise sur des expériences immersives, des stands attractifs, des contenus sur le recrutement, le gaming… Une troupe de théâtre va par exemple jouer une pièce écrite par une IA à partir de l’œuvre de Molière, et un avocat affrontera aussi une IA lors d’un procès fictif. Quelle que soit l’activation que nous mettons en place, notre priorité reste toujours la pédagogie, jamais la simplification à l’excès.
En 2024, notre application a permis 350 000 mises en relation business entre les exposants et les visiteurs.
Quels outils numériques mettez-vous à disposition des visiteurs pour bénéficier d’un parcours personnalisé ?
F.B. : Notre application dédiée à l’événement s’améliore chaque année. Elle permet de préparer sa visite ou de créer son parcours grâce à la géolocalisation et au matchmaking. Cette année, nous avons ajouté une couche d’IA pour composer son programme personnalisé et notamment lever la barrière de la langue. La solution es une vraie valeur ajoutée pour les visiteurs. En 2024, elle a permis 350 000 mises en relation business entre les exposants et les visiteurs.
Dans un secteur aussi mouvant que l’IA, rester à la pointe de l’innovation est un vrai défi pour un rendez-vous aussi important que VivaTech, non ?
F.B. : C’est un challenge permanent. Heureusement, si Jensen Huang vient à VivaTech, c’est aussi pour faire des annonces mondiales. C’est sur ce point précis que l’on peut observer la montée en puissance de VivaTech. Depuis 2016, nous sommes passés d’un événement que personne n’attendait à un rendez-vous international où les plus grands décideurs de la tech viennent dévoiler leurs innovations. Ici, on ne parle pas de ce qui se passera dans 20 ans, mais des transformations majeures des 18 prochains mois

Quels nouveaux secteurs mettez-vous en avant cette année ?
F.B. : Trente secteurs économiques sont représentés et nous donnons un coup de projecteur au tourisme et au retail. Nous accueillons par exemple la licorne française VusionGroup, acteur de premier plan de la digitalisation du commerce physique, qui présentera le magasin du futur. Quant au tourisme, c’est un secteur pionnier de la tech par lequel les utilisateurs testent très souvent les nouveautés. La place qu’il occupe dans l’économie française et l’attractivité de notre pays justifie qu’on lui accorde une place spécifique.
Viva Technology est certifié ISO 20121 : quelle actions concrètes mettez-vous en place dans un univers ou tech et RSE ne font pas toujours bon ménage ?
F.B. : En tant qu’organisateur nous avons une double responsabilité : inciter les acteurs de la tech à réduire leur impact environnemental, et participer à la transformation du secteur de l’événementiel. La réduction de notre empreinte environnementale est un pilier essentiel de notre stratégie RSE, être certifié ISO 20121 structure notre démarche. Nous avons adopté un modèle circulaire pour nos processus de production, privilégiant l’écoconception et l’efficacité des ressources. Par exemple, notre scénographie « VivaLand » intègre des scènes réutilisables, et des espaces startups utilisés lors des précédentes éditions, ainsi que des matériaux loués. Cette année, nous généralisons également le tri sélectif.
Et côté programmation ?
F.B. : Nous mettons en avant des solutions engagées et innovantes grâce à des initiatives telles que le label Tech for Change, qui récompense 30 % des innovations de startups à impact positif, et l’Impact Bridge, qui réunit plus de 50 startups axées sur le développement durable. Nous œuvrons par ailleurs pour un secteur technologique plus inclusif et diversifié, un axe essentiel pour stimuler l’innovation et la créativité, car les meilleures idées émergent d’équipes aux parcours, convictions et expériences variés. Nous nous engageons sur ce pilier en veillant activement à la parité hommes-femmes sur nos plateformes de conférence.
Nous soutenons également les femmes dans le secteur technologique grâce à des initiatives telles que le Female Founder Challenge et la session de mentorat 100+100, qui ont permis aux femmes et aux filles de bénéficier d’opportunités de mentorat uniques. De plus, nous avons ouvert notre événement aux étudiants et aux établissements d’enseignement, tirant parti de VivaTech comme d’un puissant outil pédagogique.
Un mot sur l’avenir. Viva Technology n’est-il pas à l’étroit Porte de Versailles ? Avez-vous des envies de déménagement ?
F.B. : Oui, on est effectivement un peu à l’étroit. Notre réflexion avance et, pour 2026, on réserve quelques surprises.